Dans l’univers de Clarisse Lochmann

Ce qui frappe d’emblée dans le travail de Clarisse Lochmann, ce sont ses illustrations aux couleurs diffuses, tout en transparence, dans lesquelles des formes aux contours flous dessinent des personnages, des lieux. Une impression de légèreté, de mouvement et de vie s’en dégagent.

L’autrice-illustratrice lyonnaise nous parle de son nouvel album, Josette. Il raconte un moment ténu plein de fantaisie et baigné de lumière.

L’album est construit autour d’un moment très simple : Josette et les enfants jouent à fêter Noël en plein été. Ce moment est-il vraiment arrivé ?

Oui, ce moment est vraiment arrivé. Josette, Angèle et Clément ont fait un sapin de Noël en plein été, emballé des objets et ont passé la chanson Petit papa Noël de Tino Rossi. Il paraît que la musique s’entendait jusqu’à loin dehors! Lorsqu’on m’a raconté cette histoire, ça m’a amusée et m’est resté dans la tête. Je me suis dit que j’aurais adoré faire ça, autant enfant que maintenant, adulte. Quelques jours après, j’ai rencontré « la vraie Josette » et lui ai demandé si elle était d’accord pour que je tente d’en faire une petite histoire pour un livre.
À partir de ces éléments racontés, j’ai commencé à construire des images, ajouté le fait qu’ils trinquent à Noël et s’habillent chaudement. Lorsqu’il fait très chaud en été, ça me fascine toujours d’imaginer qu’on puisse avoir froid de l’autre côté de l’année ! J’essaie de me remémorer la sensation, mais ça me semble surréaliste d’imaginer qu’on puisse porter de gros pulls en laine, des manteaux, se couvrir autant ! Et inversement, quand il fait froid en plein hiver, j’aime bien essayer de me figurer ce que ça fait l’été, d’avoir très chaud. Quand on m’a raconté cette histoire avec Josette, je me suis dit que ça serait l’angle parfait pour aborder ce jeu de bascule entre deux saisons.

C’est vrai que c’est un récit tout simple, d’autant plus que toutes les pages du livre se déroulent dans le même espace (chez Josette), et sur un court laps de temps. On peut imaginer que ça occupe environ deux heures de l’après-midi qu’ils passent ensemble. Je me dis aussi que la simplicité de l’histoire peut laisser place à l’imagination, on peut simplement y voir le jeu, se questionner sur la définition du rite, sur la perte des saisons…

Peux-tu nous parler de la véritable Josette ?

Une des choses qui m’a le plus plu dans cette histoire, c’est le fait que les âges éloignés entre ces enfants et cette personne âgée n’ait pas été un frein au jeu. Lorsque Clément demande à Josette « Pourquoi aujourd’hui, ça serait pas Noël? », on penserait d’emblée qu’elle va lui répondre qu’on ne fête pas Noël en plein été parce que ce n’est pas la bonne date, que c’est comme ça. Mais elle se prend au jeu. Je trouve qu’elle est une bonne figure de la grand-mère, qui donnerait la part belle au plaisir dans sa relation avec ses petits-enfants. On m’a raconté qu’elle n’avait pas eu d’enfants, mais que ceux qui ont grandi à ses côtés la considère comme « la grand-mère de l’île ».

Quelle ambiance voulais-tu créer ?

Je voulais essayer de créer une ambiance de chaleur, qu’on sente bien l’été.

Comment as-tu conçu ton récit ? Quelles ont été tes étapes de travail ?

J’ai d’abord imaginé un chemin de fer en faisant des dessins très schématiques à l’ordinateur. Puis j’ai affiné ces dessins pour composer mes images plus précisément, et je suis ensuite passée à l’encre. J’ai fait beaucoup d’essais, de recherches… pour finalement souvent choisir de revenir vers le premier dessin réalisé!

Ta technique est très particulière et reconnaissable, avec un travail maitrisé du flou. Peux-tu nous en parler ? Pourquoi ce rendu ? Comment procèdes-tu ?

Je suis myope et je pense que je représente ce que je vois sans mes lunettes! Pour mes précédents livres, j’ai fait les illustrations en mêlant crayon de papier, encre et dessin vectoriel. L’ajout de formes numériques me permettait de jouer entre des éléments flous et des éléments précis. Pour Josette, j’ai eu envie de supprimer cette étape du numérique et de faire des illustrations uniquement à l’encre.

Quels sont tes prochains projets ?

Entre mars et avril 2024, je suis très heureuse de signer deux nouvelles parutions. Il y a donc Josette (Versant Sud), ainsi que Charlie et Basile (MeMo). Ce dernier livre présente deux blaireaux au bord de la mer, parmi d’autres animaux installés sur la plage. Basile s’amuse à répéter tout ce que son amie Charlie dit. Elle essaie différentes techniques pour se dépatouiller de cette voix qui répète tout. Le livre est construit comme un miroir, autant dans la narration et le jeu vocal, que dans l’illustration avec le pli de page du livre qui devient comme l’axe de symétrie entre les deux blaireaux.
Je travaille aussi en ce moment à un prochain album avec Versant Sud. Même s’il peut encore changer, le titre auquel nous avons pensé avec l’éditrice, Fanny Deschamps, est C’est l’heure. L’heure de la parution sera pour 2025 !

Découvrez Clarisse Lochmann dans une vidéo réalisée par la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse en cliquant ici !